Aujourd’hui, les enjeux autour du foncier sont reconnus et admis par tout le monde, particulièrement pour les populations des communautés rurales. La terre permet à 70% des populations de ce pays de satisfaire leurs besoins essentiels. Lesquels sont, entre autres, se loger, se nourrir, se déplacer, se soigner. D’ailleurs, la dépossession d’un lopin de terre peut souvent porter un énorme préjudice à une tierce personne. Malgré cela, la recrudescence des conflits fonciers avec leurs lors de violations des droits des citoyens est devenue de plus en plus accrue. C’est pourquoi, Amadou Kanouté, Directeur exécutif de l’Institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement (Cicodev) pense qu’« il faut donner un sens pratique à la bataille contre la restriction des droits humains dans le foncier ». Il a fait ce plaidoyer lors d’un panel sur la restriction des droits humains dans le secteur foncier.
Selon lui, il est nécessaire de mettre en place des mécanismes d’adoption de gestions des ressources foncières. Il est obligatoire de garantir la transparence autour de cette question. Mamadou Mballo de Cicodev, panéliste, abonde dans le même sens. Il a rappelé que les ressources naturelles appartiennent au peuple sénégalais et que leurs exploitations doivent se faire de manière transparente. Malheureusement, il constate, pour le déplorer, que certains citoyens ne sont pas associés aux prises de décision. Ce qui lui fait dire que les perspectives sont peu reluisantes quant au respect des propriétaires fonciers.
De l’avis de El Hadji Faye, un autre panéliste, la loi de 1964 sur le foncier ne peut pas résoudre les problèmes fonciers de 2021. Il faut, de l’avis de M. Faye, réactualiser cette loi. Mieux, il indique qu’il faut l’institutionnalisation du contrôle citoyen à tous les niveaux. « Les délibérations sur le foncier doivent être transparentes. Le foncier est une ressource hyper-importante, la délibération doit se faire avec une majorité qualifiée. Il faut interdire toute forme de cession des terres au profit de l’investisseur », a déclaré M. Faye, estimant qu’il y a une nécessité de continuer le processus de réforme foncière.
« On gagnerait à revisiter la loi de 1964 et à l’adapter au contexte actuel »
Pour sa part, Aida Mbaye du ministère de la Bonne gouvernance rappelle qu’avant la loi de 1964, il y avait le droit coutumier en matière foncière et il y avait une légitimité coutumière qui prévalait toujours dans la gestion des terres. Donc, c’est à partir de 1964, que le Sénégal est devenu une exception en matière foncière dans la mesure où c’est le seul pays qui a instauré le régime de la domanialité nationale telle que cela ressort des textes. Il fait également partie des rares pays qui n’ont pas encore adopté une loi sur l’accès à l’information. « L’immatriculation aujourd’hui constitue la règle. Si on veut que cela change, il faudra changer ce principe fondamental qui veut que l’immatriculation passe par l’Etat. Il faudrait porter à la connaissance des usagers le droit foncier parce qu’un droit ne se réclame pas par des manifestations, un droit ne se réclame pas dans la rue, un droit se réclame par une action judiciaire devant un tribunal », a expliqué Aida Mbaye. Poursuivant, elle soutient que le citoyen doit être au courant des décisions qui sont prises par le Conseil rural. « Aujourd’hui, ce qu’il faudrait faire c’est adapter la loi de 1964 au contexte actuel parce qu’une loi est impopulaire si elle ne sert pas in-fine aux populations. Aujourd’hui, vu les conflits qui sont relatifs au foncier, on gagnerait à revisiter la loi de 1964 et à l’adapter au contexte actuel », ajoute-t-elle.
Source:Emedia du 7 avril 2021