L’accès des femmes au foncier, au Sénégal, constitue toujours une problématique, malgré les nombreux acquis enregistrés.
L’Alliance nationale femmes et foncier (ANFF) organise, depuis hier, un atelier de deux jours sur l’accès des femmes au foncier. Ainsi, la cérémonie de lancement de la campagne dénommée ’’Debout sur sa terre’’, a permis de passer en revue les pesanteurs qui bloquent l’accès des femmes à la terre, afin d’y remédier.
L’accès des femmes au foncier, au Sénégal, constitue toujours une problématique, malgré les nombreux acquis enregistrés. Les différentes organisations qui s’activent dans ce domaine ont jadis mené des actions isolées qui ont rendue inefficace le combat pour l’égalité homme-femme dans l’acquisition des terres.
Ainsi, l’Alliance nationale femmes et foncier (ANFF) en partenariat avec Landesa, a lancé hier, à Dakar, la campagne ’’Debout pour sa terre’’. Le directeur exécutif de l’Institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement (CICODEV) renseigne que des organisations comme Actionaid, Ipar et le Congad ont décidé de mettre sur pied l’Alliance nationale femmes et foncier (ANFF) en 2018.
D’après Amadou Kanouté, cette décision résulte d’un constat qui relève que ces structures agissent toutes pour que les femmes puissent accéder au foncier, mais séparément. ’’On s’est rendu compte qu’il y avait un gab entre le cadre normatif et la réalité du terrain, malgré le fait que notre ordonnancement juridique est parfait. De la Constitution jusqu’aux textes réglementaires, tous reconnaissent que l’homme et la femme sont égaux pour l’accès aux ressources naturelles’’, a indiqué M. Kanouté, par ailleurs Coordonnateur de l’Alliance nationale femmes et foncier.
Ainsi, pour rendre leur plaidoyer plus efficace, ces structures ont jugé nécessaire de mener des actions conjointes, à savoir parler aux mêmes cibles, aux mêmes ministères, mais également développer un plan stratégique dans le cadre de l’alliance, qui permettra de faire en sorte que leur travail puisse aboutir à des résultats. ’’La mise en œuvre en 2018, a permis de donner de la visibilité à l’alliance et à faciliter notre insertion dans les réseaux au plan international. C’est l’objet de la campagne que nous allons lancer à partir de cet atelier. Faire en sorte que la pratique sur le terrain reflète le cadre normatif, c’est ce gab que nous essayons de combler en lançant cette campagne’’, a fait savoir le directeur exécutif du CICODEV Afrique, qui assure par ailleurs la présidence de cette alliance nouvellement constituée.
Après cette synergie, les membres de l’alliance devront faire face aux pesanteurs qui sont de plusieurs ordres et empêchent aux femmes d’accéder à la terre. Concernant ces dernières, Amadou Kanouté liste les contraintes sociales, économiques ou religieuses. Selon lui, dans certaines sociétés, il est difficile, pour la femme, de posséder des terres ou d’obtenir la moitié de l’homme, en cas de partage sur le plan religieux. A cela s’ajoutent les faibles revenus économiques des femmes qui font qu’elles peinent à acheter des terres et s’adonner à des activités agricoles.
’’Les femmes font face à toutes ces difficultés. Il s’agira, pour le projet, de travailler à faire en sorte que ces difficultés puissent être réduites à travers la sensibilisation, l’information et des conversations avec les leaders d’opinion pour qu’ensemble, on puisse dire les lois dans ce pays qui consacrent que l’homme et la femme sont égaux dans l’accès au foncier’’, explique le directeur exécutif du CICODEV .
Il prévoit, dans le même sillage, l’implication des institutions financières pour appuyer les femmes, afin de leur permettre de mettre en valeur ces terres arables. ‘’Cela ne sert à rien de donner une terre à une femme qui peut cultiver, mais qui n’a pas les moyens économiques de garder le contrôle effectif réel de la terre. C’est tout cela qui fait que nous lançons cette campagne avec l’appui de Landesa’’, poursuit-il.
La secrétaire exécutive d’Enda Pronat estime, pour sa part, qu’il s’agit, à travers cette campagne, d’un combat pour le rétablissement de la justice sociale et la légalité des communautés. D’après Mariem Sow, les pesanteurs sont là, mais cela n’empêche en rien les résultats satisfaisants qui sont en train d’être réalisés. ’’Des femmes parviennent, dans la zone des Niayes, à hériter de terres. Avec la parité, le combat se fait par la formation, l’information, le renforcement des capacités de ces femmes qui sont dans les instances locales. Donc, l’espoir est permis au Sénégal’’.
Madame Sow pense néanmoins que quelle que soit la volonté des organisations, tant que les politiques nationales ne s’engagent pas, il restera du chemin à faire. A ses yeux, le combat ne peut être efficace que si l’on trouve des systèmes de financement et d’appui aux femmes, car, fait-elle remarquer, c’est bien d’avoir de la terre, mais c’est encore mieux de pouvoir la mettre en valeur.
A ces préoccupations, la conseillère en genre au ministère de l’Elevage et des Productions animales rassure que l’Etat appuie cette couche de la société par le biais des mécanismes institutionnels. Ndèye Safietou Diop rappelle, à cet effet, la loi agro-sylvopastorale qui, dit-elle, est loin d’être discriminatoire. ’’On se rend compte que les femmes ignorent et vivent des barrières pour accéder aux terres, mais cette loi permet à toutes les femmes de demander la terre pour travailler’’. Toujours dans ces mécanismes, elle cite la stratégie d’égalité et d’équité des genres dans ses composantes, qui encourage les femmes les accompagne pour accéder à la terre et les encadre pour le financement’’, souligne la représentante du ministère de l’Élevage. Pour qui les mécanismes d’accès au financement se sont améliorés avec le dernier-né qu’est la Délégation à l’entreprenariat rapide (Der).
Il s’agit, selon Ndèye Safiétou Diop, des fonds qui existent dans les différents ministères et qui sont ouverts aux femmes. ’’Je suis venue vous assurer de la main tendue de l’Etat par rapport à cette campagne de plaidoyer. L’Etat vous ouvre ses portes à travers ses différents ministères, institutions et structures pour qu’ensemble, nous atteignions cet objectif qui est d’accéder à la terre de manière pratique. La cause que vous défendez est plus que noble. Vous le faites pour l’Etat’’, se réjouit-elle.