Célébrée cette année dans le village de Thiamène Taba, situé à environs 30 à 40 km au Sudouest de Kaolack, dans la commune de Keur Socé, la Journée mondiale de la femme rurale a été soutenue par la Fédération des Associations des femmes sénégalaises (Fafs), aux côtés de l’Alliance nationale Femmes et foncier. |
Outre l’aspect récréatif qu’elle a souvent revêtu, malgré les souffrances traversées, cette journée a été en effet l’occasion pour les femmes rurales de plaider leurs causes, mais surtout poser les problèmes qui les empêchent naturellement leur promotion, mieux leur autonomisation dans la société où elles évoluent aujourd’hui.
Ainsi, devant la présidente de la Fafs, Adjia Ndiouck Mbaye, ces braves dames ont dénoncé avec véhémence les innombrables problèmes auxquels elles sont permanemment confrontées pour accéder au foncier et développer leurs activités agricoles au sein de leurs collectivités. A chaque hivernage, ces femmes disent être obligées de débourser 50.000 à 75.000 F CFA pour louer un hectare de terrain et pouvoir cultiver la variété voulue. Une charge qui devient de plus en plus insupportable chez les femmes, lesquelles sont aussi appelées à effectuer d’autres dépenses pour l’acquisition des semences et intrants, le transport de ces produits vers la destination voulue et le paiement de la main d’œuvre pour certaines. Selon la présidente de la Fafs, «l’autonomisation de la femme rurale n’est pas pour demain. Ce qui le justifie est que, pour cette année, l’Etat n’a dégagé que 10 tonnes de semences et autant de tonnes d’engrais pour une fédération qui compte aujourd’hui plus de 302.000 membres. Ce qui d’ailleurs est jugé «inacceptable pour la Fafs car, nous l’avons trouvé très insuffisant par rapport à la demande. Mais nous avons quand même réussi à faire le partage». C’est d’ailleurs pour ces mêmes raisons que la Fédération des Associations des femmes du Sénégal réclame et exige la tenue des Assises nationales sur l’Agriculture et le foncier afin que les acteurs réunis autour de ces deux entités puissent diagnostiquer les vrais problèmes qui gangrènent notre agriculture et le partage équitable du foncier afin de pouvoir y apporter des solutions. Car, nous confie Mme Ndiouck Mbaye, «bon nombre de femmes n’ont pas cultivé cette année, faute de semences, matériels agricoles mais surtout de terres arables dans leurs propres collectivités où toutes les terres cultivables ont été affectées aux hommes. On ne peut pas être pauvre et autonome à la fois», a-t-elle soutenu. LES PISTES DE PRODUCTION, UNE VERITABLE EQUATION POUR LES FEMMES RURALES Outre les difficultés liées à l’accès à la terre, aux matériels agricoles, aux semences et autres intrants agricoles, les femmes du village de Thiamène Taba et environs ont profité de la journée qui leur est dédiée, hier mercredi, pour dénoncer l’enclavement dont elles sont victimes. Pendant de longues années, ces populations de femmes ont toujours décrié cette situation, mais vainement. Car aucune solution n’a été trouvée pour les sortir de l’ornière. En cas de maladie ou autre besoin d’accouchement, ces femmes disent être dans l’obligation de parcourir près d’une dizaine de kilomètres pour rallier le poste de santé le plus proche. Contraires à leurs sœurs des villes qui sont souvent conduites à bord d’une ambulance, ces femmes rurales n’ont qu’un seul moyen de transport : la charrette. Conséquences, sur ces pistes sablonneuses et chaotiques, beaucoup d’entre elles y perdent la vie au moment de leur transfert à la structure sanitaire la plus proche. Toutefois, dans un contexte de pleine lutte contre la pandémie du coronavirus, les femmes du monde rural ont fait montre d’un engagement particulier d’être de vraies actrices du développement lors de cette dernière édition de la Journée nationale de la femme rurale. Mais, paradoxalement, dans l’accomplissement de cette mission, elles n’ont pas accès au foncier, ni aux matériels agricoles, ni aux semences, ni aux intrants, déplorent-elles. Pis, elles se sentent toujours laissées à elles-mêmes et invitent l’Etat à leur restituer tous ces droits. Abdoulaye FALL |